Note
5/5
Bilan 3D :
Après avoir passé avec mention 'félicitations' l'examen d'entrée à
la 3D, un certain nombre de virtuoses de la réalisation 2D ont montré
ces dernières années leur aisance et leur insolente maîtrise de la mise
en scène 3D et des contraintes de tournage en 3D native : James Cameron,
Ridley Scott, Martin Scorsese, Ang Lee, Guillermo Del Toro,
Peter Jackson, J.J Abrams, Baz Luhrmann, Tsui Hark, et dernièrement le
moins connu Alfonso Cuarón (à vous de retrouver facilement qui a réalisé
quoi en 3D). Passage obligé pour rentrer à la fois dans le modernisme
et la postérité, c'est au tour de notre maestro français Jean-Pierre
Jeunet de s'y frotter avec l'adaptation captée en 3D
native du roman à succés de Reif Larsen. Et le résultat ? On pourrait
presque dire que c'était déjà joué d'avance, et que le suspense était
pipé ! Pourquoi ? Parce que notre Jean-Pierre Jeunet national nous
revient en forme olympique, et dégaine de nouveau une photographie 3D
d'un autre monde, doublée d'une profondeur 3D admirable sur la durée, et
troublante de réalisme. Dès les premières minutes, la recette prend à
la gorge, et en dépit de ce format toujours réducteur de 2.40, on se
retrouve projeté dans cet univers haut en couleurs à l'atmosphère
presque palpable. La profondeur de champ tabasse en permanence, la
saturation artistique des couleurs, le détachement 3D délirant entre les
éléments, la profondeur abyssale des noirs en 3D, tout concourt à
mettre rapidement K.O sur le registre. Quels que soient les
environnements ou les types de plans utilisés, on est à même de jouir
d'une excellente spatialisation 3D. Pour pinailler on trouvera quelques
rares résidus de flou sur certains plans rapprochés, et accessoirement
lors de certains jaillissements extrêmes ? Non, ce n'est pas une faute
de frappe, vous avez bien lu ce mot qu'on n'attendait pas du tout dans
ce genre de production. Et pourtant J-P Jeunet montre combien il aime la
3D et s'en amuse, avec une mise en scène 3D qui combine de manière osée
jaillissements permanents et réalisme. De nombreux réalisateurs ont
montré que ce n'était pas indissociable, et c'est le cas dans Spivet 3D.
Ainsi dès les premières minutes, on peut apprécier de nombreux
débordements, voir même des jaillissements permanents de décors, ou de
bustes du héros à 1m (voire plus) hors du mur, toujours amenés de
manière subtile et réaliste grâce à une recette que la maître Cameron a
été le premier à inventer en son temps, qui tourne autour de la mise en
scène et des transitions de plans et perspectives. Pour être honnête,
une simple couche de débordements plus ou moins prononcée sur la durée
aurait été suffisante pour soutenir la superbe profondeur 3D et garantir
également la note maximum. Pourtant Jeunet montre qu'il est joueur, et
il se risque même à insérer des jaillissements permanents extrêmes,
autant dire top démo, car plutôt rares en général. Tout d'abord la
matérialisation furtive des inventions de T.S Spivet se fait à l'aide
d'impressionnants jaillissements permanents de plus de 2m50 pendant
quelques secondes (exemple avec un appareil volant qui s'approche du
canapé). Autres astuces de mise en scène : l'intégration à quelques
reprises de fenêtres contextuelles qui se rajoutent à l'image, avec une
intensité de sortie d'écran assez violentes (on dirait presque du Sammy
3D pour utiliser une image un peu forte). Idem dès les premières
minutes, le film nous propose un jaillissement de carabine au milieu de
la pièce, suivi 1 minute plus tard d'un sabre qui sort encore de plus de
2m hors du mur. Et tout ça se passe dans le plus grand naturel, et sans
avoir cette impression d'effets gadgets dans l'ensemble (sauf peut-être
sur les inventions et les fenêtres contextuelles). Tout fusionne à la
perfection, et contribue à donner cette forte identité visuelle 3D et
cette immersion dans ce monde. De même le film prend parfois un malin
plaisir à étendre des têtes jusqu'au milieu de la pièce, comme ça, sans
prévenir. Pour finir on aura aussi de classiques séquences de
jaillissements permanents de particules (de courts passages avec du
pollen qui flotte par exemple ou des lucioles). Il y a manifestement
dans ce film, une mise en scène 3D authentique qui reproduit
pratiquement à l'identique celle de Hugo Cabret 3D
mais en 2.40 (au grand dam de certains) tant sur la profondeur 3D que
sur la palette de jaillissements permanents. Même si ces derniers
représentent en proportion une part mineure du film, ils savent frapper
par surprise quand il le faut de manière juste, souvent furtive, et
parfois même très fort, avec toujours ce souci d'apporter du plaisir au
spectateur 3D averti avec le bon effet au bon endroit et au bon moment.
Au final, un film à la narration particulière (qui semblera peut-être
trop contemplative pour certains), sorte de quête initiatique parfois un
peu aseptisée qui fascinera les uns et frustrera légérement les autres,
mais dont la 3D premium propulse Jean-Pierre Jeunet directement dans
les étoiles de la réalisation 3D. On n'en attendait pas moins de lui
pour son premier essai, et dire qu'il est réussi est un euphémisme. Dire
qu'il rentre dans la shortlist privilégiée des challengers pour notre
dossier des meilleurs Blu-ray 3D 2014 est certainement plus explicite !
Franck L.
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